Image : © Anne-Lise Combeaud
Budget livre en FWB : une avancée historique
Quelle formidable avancée pour le secteur des langues, lettres et livre ! L’augmentation historique du budget des aides ponctuelles ouvre enfin de nouvelles perspectives pour les professionnel·les : auteurices, éditeurices et libraires voient leurs efforts et leurs revendications portés depuis des années récompensés. C’est un véritable souffle d’espoir pour une filière souvent mise de côté, mais essentielle à notre culture et à notre société. Revenons sur les points clés et les actions déterminantes qui ont rendu cette victoire possible !
Budget 2025 : un investissement sans précédent
Pour la première fois depuis des décennies, le budget des aides ponctuelles a été ajusté en tenant compte de l’inflation et des besoins urgents des professionnel·les. Grâce à cet effort budgétaire inédit, le financement global du secteur s’élève désormais à 6,23 millions d’euros en 2025, soit une augmentation de 39 % par rapport à l’année précédente. Plus spécifiquement, une enveloppe de 2,8 millions d’euros est prévue pour les aides ponctuelles, doublant ainsi les 1,4 millions inscrits dans le dernier budget de 2024. Ces fonds seront alloués selon les règles fixées par le nouveau décret adopté le 4 avril 2024 relatif au subventionnement des secteurs professionnels des langues, des lettres et du livre. Leur distribution sera précisée par un arrêté du gouvernement.
L’impact de cette mesure est d’autant plus significatif que, pour la première fois, les bourses destinées aux auteurices pourront être revalorisées selon les recommandations de la Chambre de Concertation des Écritures et du Livre (CCEL). L’augmentation des aides pluriannuelles (+10,3 %) et surtout des aides ponctuelles (+106 %) traduit une volonté claire de répondre aux revendications portées par les acteurices du livre, qui dénonçaient depuis trop longtemps le sous-financement chronique de ce secteur.
Rôle clé d’ABDIL
Dans ce contexte, il est important de souligner le rôle fondamental joué par ABDIL. Depuis sa création en 2016, la fédération a été un moteur des revendications en faveur d’un refinancement ambitieux du secteur des lettres et livre. Reconnue en 2020 en tant que fédération professionnelle, ABDIL siège depuis lors à la CCEL, où elle s’attache à défendre les droits des auteurices et des autres professionnel·les. La fédération a activement participé à la rédaction d’avis et d’amendements sur les projets de décrets et d’arrêtés, notamment en mettant en lumière les besoins criants des créateurices. Par exemple, elle a identifié les priorités dès le début, notamment le doublement des montants des bourses (de création, de résidence, d’encouragement et de projet), ainsi que la simplification des justificatifs pour ces aides.
Ces derniers mois, les actions structurantes menées par ABDIL ont été particulièrement marquantes. Parmi celles-ci, la campagne sur le 0,4 % a dénoncé l’absence d’indexation ou de revalorisation du budget alloué aux lettres et livre, une situation qui équivalait à une baisse effective des moyens alloués en raison de l’inflation. Cette campagne a souligné que le secteur ne recevait que 0,4 % des budgets alloués à la culture, un chiffre dérisoire au regard des missions essentielles qu’il assume et des défis qu’il rencontre. De plus, ABDIL a imposé que la création et les auteurices soit parmi les mesures prioritaires du nouveau décret relatif au subventionnement des secteurs professionnels des Langues, des Lettres et du Livre. Pour info, ce décret, une fois approuvé, permettra à notre secteur de s’assurer un financement minimum, indépendant des autres enveloppes budgétaires. Enfin, ABDIL a introduit de nombreux amendements au nouveau décret visant à améliorer la reconnaissance et la rémunération des auteurices. Nous avons travaillé pendant des semaines sur l’avis concernant l’arrêté lié au décret en collaboration avec la Scam? et le soutien d’autres fédérations professionnelles. Publié en mars 2024, cet avis a mis en lumière l’insuffisance des moyens budgétaires prévus par le décret et demandait :
• le doublement des montants des différentes bourses (encouragement, projet, création, résidence) ;
• une plus grande flexibilité dans les critères de durée pour les bourses de création, avec la suppression de l’obligation de justification en semaines de travail, remplacée par la présentation de l’état d’avancement ou de la publication liée à la bourse ;
• la revalorisation des avances sur droits pour les aides à l’édition, incluant une rémunération équitable des auteurices avec prise en compte des cotisations sociales.
Bien qu’appuyer le doublement des bourses comportait le risque de réduire le nombre de bénéficiaires si le budget global n’était pas augmenté, ABDIL a maintenu cette position. Ce levier était essentiel pour obtenir un refinancement ambitieux et durable, nécessaire au développement du secteur. Et on a bien fait !
Mobilisation collective
ABDIL a également su mobiliser d’autres fédérations professionnelles, qui ont rejoint plus récemment cette lutte pour l’augmentation des moyens destinés au secteur. La Scam, par exemple, a fortement plaidé pour une augmentation des aides en 2023, contribuant à élargir la mobilisation. Cependant, il est clair que sans l’impulsion initiale d’ABDIL et son travail de fond depuis 2016, ces avancées n’auraient pas été possibles. C’est en partie grâce à la pression collective exercée par ABDIL et ses partenaires que les revendications des professionnel·les ont trouvé un écho auprès des décideur·euses public·ques.
Prochaines étapes
Dans un souci de vision à long terme, ABDIL continue de défendre un refinancement global qui soit à la hauteur des enjeux sociaux, économiques et technologiques auxquels font face les acteurices du livre. Nous insistons également sur la nécessité d’adapter les dispositifs d’aide aux spécificités des différents métiers de la filière, tout en simplifiant les procédures administratives souvent trop lourdes pour les professionnel·les. En parallèle, ABDIL alerte sur l’absence de soutien structurel aux éditeurices indépendant·es et aux opérateurices culturel·les, dont beaucoup survivent uniquement grâce à l’énergie de bénévoles. Ces structures essentielles au dynamisme du secteur devraient bénéficier d’un financement équitable, à l’instar des subventions accordées à d’autres branches culturelles.
En conclusion, cette augmentation budgétaire marque une avancée significative, bien qu’elle s’inscrive dans un contexte de départ très modeste : une hausse de 40 %, certes, mais sur une base initiale limitée. Il s’agit d’une première étape et d’un signal positif de la Fédération Wallonie-Bruxelles?, mais le budget demeure insuffisant pour répondre pleinement aux attentes du secteur et aux besoins des auteurices. Notre revendication d’une augmentation annuelle de l’enveloppe devra se poursuivre, d’autant plus que ce budget reste l’un des plus faibles de la FWB, aux côtés des arts plastiques. Nous allons donc continuer de travailler pour enrayer la précarisation des acteurices du livre et bâtir une filière durable, diversifiée et ambitieuse. C’est une victoire partagée, mais le combat pour un secteur littéraire fort et valorisé ne fait que commencer.